Jude n'était pas sorti de chez lui depuis plusieurs jours. Il ne recevait personne, même pas Art. Aphrodite avait réussi à s'incruster, mais il n'avait eu qu'une envie, c'était de la mettre dehors.
Il passait son temps à faire du ménage, pour tenter de nettoyer ses problèmes... Sans succès. Son appartement n'avait jamais été aussi propre et ses pensées aussi sombres.

Il n'était pas retourné au travail depuis plus d'une semaine, il était incapable de faire du bon boulot et ça aurait été totalement inconscient de lui laisser des vies entre les mains. Il avait parlé à sa psy qui lui avait donné un arrêt. Il n'aurait l'autorisation d'exercer son métier qu'avec son autorisation quand il irait mieux. Impossible que ça arrive un jour, pas de ces conditions.

Yeimy le détestait, pour de très bonnes raisons et il se détestait aussi.

Les mots qu'elle avait écrits dans son dernier texto tournaient sans cesse dans sa tête, il lui était impossible de s'en défaire. Il avait trahi Josh en faisait du mal à sa petite sœur.

Depuis la mort de Josh, Jude s'était dit qu'il valait mieux ne plus voir Yeimy, car un jour ou l'autre, elle lui en voudrait, car il n'avait pas su le sauver. Lui, il s'en voulait. Et alors qu'elle insistait pour le voir et lui parler, il s'était dit qu'elle n'avait pas encore compris et qu'elle allait finir par lui en vouloir. Puis il l'avait embrassé à Noël parce qu'elle avait cru que c'était lui qui la détestait – chose totalement absurde, il n'avait toujours eu que de l'amour pour elle.

Finalement, à la St Valentin, c'était elle qui l'avait embrassé et là, il avait compris qu'elle ne lui en voulait pas, même si, lui, il s'en voudrait toujours. Il avait alors fait taire son cerveau et suivi son cœur ce soir-là.
Il aurait tellement aimé pouvoir faire ça pour le restant de sa vie.

Le lendemain, sa tête avait repris le dessus, il ne serait pas capable de la rendre heureuse, alors il avait dû partir. Il avait fui, incapable de lui dire en face ce qu'il avait dû marquer sur ce fichu bout de papier.

Il avait essayé de reprendre sa vie en main. Il avait réussi à travailler pendant quelques semaines, il avait vu Art, sa famille, mais il n'était clairement plus le même.

Puis le 8 mars, tout a changé, Yeimy lui avait envoyé un vocal alors qu'elle avait beaucoup trop bu. Elle ne faisait jamais ça habituellement. Il lui avait brisé le cœur. Si seulement il avait su, il y a des années de ça, que ses sentiments pour elle auraient pu être réciproques... Mais le destin était passé par là, il leur avait arraché leur meilleur ami et Jude n'avait pas su le sauver.

Le 13 mars, à 17h06 Jude reçu un sms de Yeimy qui fit comme une averse dans une tasse à café déjà bien pleine. Il était submergé par les émotions et les pensées négatives. Il n'y arrivait plus...

Il était assis sur son canapé, regardant la boîte quasi-pleine d'anti-douleurs qu'il avait devant lui. S'il les ingérait tous, il s'intoxiquerait. Il n'existait déjà plus pour Yeimy alors autant ne plus exister du tout.

Il attrapa une feuille et un stylo pour écrire ces mots qu'il n'avait jamais su lui dire. "Je t'aime Yeimy Mendoza-Hollister."

Jude attrapa la bouteille de vodka qu'il avait trouvée dans un placard et bue une longue gorgée puis il avala la boite entière des anti-douleurs. Il s'allongea ensuite sur le canapé, fixant le plafond et attendant que tout s'arrête.

Ses pensées étaient confuses, il voulait juste que son cerveau s'arrête, mais une mélodie l'empêchait de sombrer, Les Beatles ? Your mother should know, your mother should know... La musique n'était pas juste dans sa tête, c'était son téléphone. Sa mère l'appelait.

« Ma.. Maman... »

Il ne pouvait pas lui faire ça ! Il faisait une grosse connerie. Il se laissa tomber du canapé, sa respiration était lente, bientôt, il ne pourrait plus du tout respirer... Naxolone, il lui fallait la naxolone qui était... Dans la salle de bain. Il se leva avec peine et se dirigea vers la salle de bain, qui n'était qu'à quelques mètres. Le trajet lui semblait interminable, il était essoufflé, mais attrapa enfin la trousse contenant les doses de naxolone dans son placard. Il avait administré ça à tellement de patients en overdose qu'il connaissait la méthode par cœur. C'est donc machinalement qu'il s'injecta directement deux doses.

Your mother should know, your mother should know...

Sa mère appelait de nouveau. Il n'avait aucune idée du temps qui avait séparé ces deux appels, mais il se sentait déjà un peu mieux et réussi à retourner au salon à temps pour décrocher, les larmes aux yeux.

« Maman... Je suis désolé Maman, je t'aime... Il faut que Papa vienne me chercher.»